2. Contestations contre le pouvoir en place


Au VIIeme siècle avant J.C, les premiers messages qui apparaissaient sur les murs des villes étaient simplement des encouragements pour certains sportifs ainsi que des gladiateurs ou encore des messages religieux, voir même amoureux, érotiques, et pornographiques. Quant à la Turquie, dans la cité d'Ephèse on trouvait des publicités pour trouver des prostituées. 


Mais, durant l'empire romain (27av. J-C / 476) les messages réellement indispensables et engagés se créèrent. Les murs d'Athènes servaient à exprimer des revendications des citoyens. On connaît notamment les graffitis satiriques et électoraux sur les pierres de la cité de Pompéi puisqu'ils ont été conservé sous la cendre lorsque la ville en fut recouverte lors de l'éruption volcanique en 79. Celui-ci, par exemple, nous prouve que les contestations sur les murs étaient très nombreuses : « Admiror o paries te non cecidisse ruinis qui tot scriptorum taedia sustineas. » ; « Mur, je suis surpris que tu ne te sois pas effondré sous le poids des bêtises de tous ceux qui ont écrit sur toi. » ou encore « Pecunia non olet » ; « L'argent n'a pas d'odeur» qui est une expression encore utilisée de nos jours.
"Venimus hoc cupidi, multo magis ire cupimus"  (Nous avions envie de venir ici, nous avons encore plus envie d'en repartir)
Au temps des Lumières, XVIIIème siècle, ainsi que lors de la Révolution française, les prisonniers, négligés dans les oubliettes, avertissaient leurs compatriotes de la rébellion commençant à gronder, par des gravures sur les parois internes du cachot pour les prochains arrivants. 

Durant la révolution mexicaine qui s'étend du 20 Novembre 1910 au 27 Mai 1911, Diego rivera eut un rôle important puisqu'il fit beaucoup de peintures murales revendicatrices d'idées communistes, que l'on pourrait considérer comme des graffitis puisque le principe est le même. Il fait des fresques gigantesques pratiquement toutes engagées. Il était le mari de Frida Kahlo qui fut, elle aussi, une artiste peintre importante pour son époque. José Clemente Orozco, David Alfaro Siqueiros, Gerardo Murillo et Juan O'Gorman les accompagnaient dans leurs nuits de fêtes et leurs provocations. La plupart de ses œuvres sont des manifestes politiques ou des dénonciations du système économique. Il ne refusait pas les commandes des riches mais au contraire en profitait pour faire passer de petits symboles communistes ainsi que des représentations de la lutte ouvrière à l'intérieur de ses œuvres.

  
Par exemple, cette œuvre fait étrangement penser à Métropolis de Fritz Lang, qui est un film qui aborde la différence de classe sociale entre les patrons haut perchés dans leur jardin d'éden, dans un stade ou dans leurs tours, et les ouvriers au sous sol, qui ne voient pas la lumière du jour mais seulement la pénombre des machines.

En France, dans les années 60, et plus particulièrement en mai 68, le peuple s’est embrasé, de petites révoltes ont éclaté et les contestations qui ont fusé, ont marqué les murs de leurs débris. Les universités ferment ainsi que les usines. Les voitures brûlent les gaz lacrymogènes se multiplient mais les munitions les plus efficaces restent les mots. La jeunesse s’empare d’un besoin d’expression et c’est donc aux environs de cette date que s’est propagée la manie du pinceau. La contagion fut terrible et les séquelles sont encore bien présentes, en voici quelques exemples à Paris : « L'aboutissement de toute pensée, c'est le pavé dans ta gueule, C.R.S. »  Rue de Rennes, « L'agresseur n'est pas celui qui se révolte mais celui qui réprime » Rue Saint-Jacques « Autrefois, nous n'avions que le pavot. Aujourd'hui, le pavé. » Nanterre « Céder un peu c'est capituler beaucoup » Beaux-Arts. Les ateliers des Beaux Arts et des arts-déco se forment en équipes et se relaient à différents moments de la journée ou de la nuit pour tapisser les murs de ce genre de propos. Des milliers d’affiches sont crées pour être collées dans tout Paris. 
« Soyez réalistes, demandez l'impossible »

« C'est parce que la propriété existe qu'il y a des guerres, des émeutes et des injustices. » (Saint Augustin) «Consommez plus, vous vivrez moins » Rue de Rennes et/ou Sorbonne, hall Richelieu « L'économie est blessée, qu'elle crève ! » Rue Linné Élections pièges à cons » Place Saint-Michel « Enragez-vous » Nanterre, amphi. « Fais attention à tes oreilles, elles ont des murs »Censier, « Il est interdit d'interdire » Rue Saint-Jacques et/ou Nanterre, amphi musique, « Il n'y aura plus désormais que deux catégories d'hommes : les veaux et les révolutionnaires.  En cas de mariage, ça fera des réveaulutionnaires. » Educat. surveillée
« Ni dieu ni maitre, à bas l’État » 






« Le vote ne change rien, la lutte continue »








« L'insolence est la nouvelle arme révolutionnaire » Médecine « J'emmerde la société et elle me le rend bien » Condorcet « Je participe. Tu participes. 
Il participe. Nous participons. Vous participez. Ils profitent. » « La marchandise est l'opium du peuple. » « Métro, boulot, dodo » « N'admettez plus d'être / immatriculés / fichés / opprimés / réquisitionnés / prêchés / recensés / traqués » Odéon, escalier foyer « La nature n'a fait ni serviteurs ni maîtres, je ne veux donner ni recevoir de lois » Hall, Sciences Po. « Ni robot, ni esclave » Censier « O gentils messieurs de la politique, vous abritez derrière vos regards vitreux un monde en voie de destruction. Criez, criez, on ne saura jamais que vous avez été castrés. » Sorbonne, galeries Lettres, etc. C’est dire si le virus des maux de têtes fut remplacé par celui des mots violents.

Bien plus tard dans l'Histoire, lors de la révolution culturelle instaurée par Mao Zedong de 1966 jusqu'à sa mort en 1976, il voulut revenir au pouvoir, et pour y remédier, il désirait assainir le parti communiste chinois et limiter les pouvoirs de l’administration. Il instaura une révolution culturelle qui entraîna les rebelles contre cette situation à risquer leur vie pour peindre sur les murs les fameux dazibaos ; affiche traditionnelle de Chine ouvert à tous les citoyens qui désirent exprimer leur insatisfaction politique ou morale. Elle est publique et collée sur les murs des rues, à l’époque elle servait de journaux de propagande anti-maoïste.

Le Printemps Arabe, aussi baptisé «  Révolutions Arabes », « Révoltes Arabes » ou bien « Réveil Arabe », est un ensemble de protestations populaires plus ou moins important qui nait dans de multiple pays du monde arabe à partir de décembre 2010 et toujours en cours. Comme en Tunisie, en Egypte, en Libye, au Maroc, en Algérie, au Yémen, au Bahreïn, en Syrie, en Jordanie, en Oman et dans de nombreux autres pays où les manifestations restent mineures. Ainsi on voit sur des murs Tunisiens des messages, pour la plupart de soutient « Restez debout les Tunisiens, tout le monde est fier de vous », de toutes les langues «  We will not give up » et même de l’humour sur le mur de la honte, ci-dessous : 











Ainsi, on remarque que quelque soit l'époque dans laquelle ils vivaient, les peuples se retrouvant face à des guerres et des conflits se servaient du graffiti soit pour attaquer l'ennemi par les mots, soit pour hurler leurs souhaits de paix, soit pour des messages de soutiens, soit pour transmettre leurs idées.